Polycarie III

par | Sep 12, 2013 | soins | 0 commentaires

polycarie

Démonstration de la pathogénie toxinique des caries dentaires tuberculiniques.

Les preuves de leur existence peuvent être rangées en quatre chapitres différents :

  1. Les preuves expérimentales ;
  2. Les preuves cliniques ;
  3. Les preuves thérapeutiques ;
  4. Les preuves histologiques.

Preuves expérimentales.

Si les documents sur ce chapitre sont encore rares, nous avons été assez heureux à plusieurs reprises pour observer des caries de cause tuberculinique produites dans des conditions qui ont toute la valeur d’expériences. Des erreurs thérapeutiques dans l’administration des tuberculines, particulièrement le sérum de MARMORECK et le bouillon filtré de DENYS, ont amené des désordres de déminéralisation tels, que nous avons vu apparaître des caries à évolution rapide et en nombre absolument anormal. Voici quelques observations.

OBSERVATION N° 1

  • Tuberculose ancienne du sommet du poumon gauche,
  • tuberculinothérapie trop intensive,
  • apparition de nombreuses caries.
  • Âge : 17 ans.

Mlle X., 17 ans, dont nous avons traité les dents en 1907, s’est fait soigner pour un asthme ancien datant de l’enfance ; elle est porteuse d’une cicatrice tuberculeuse au sommet du poumon gauche ; la pression révèle encore une vive sensibilité ; le foie est encore légèrement sensible ainsi que la rate.
En vue de lui guérir son asthme, on lui fit subir une série de traitements sans aucun résultat ; finalement elle fut soumise à des injections de sérum de MARMORECK à raison de 5 à 6 injections de 1 cm. par semaine ; au bout de six semaines, elle fit de graves accidents de déminéralisation, et de multiples caries dentaires apparurent ; toutes les dents obturées devinrent douloureuses, et en l’espace de trois mois, nous constatâmes une dizaine de caries nouvelles dont l’évolution avait été extrêmement rapide ; huit sur les dix dents furent dévitalisées.
Depuis la malade a été perdue de vue.

OBSERVATION N° 2

  • Tuberculose des deux sommets pulmonaires ;
  • doses trop fréquentes et trop concentrées de Marmoreck.
  • Apparition de caries au collet sur toutes les dents.
  • Âge : 18 ans.

Cette observation date à peu près de la même époque que la précédente ; il s’agissait d’un garçon de huit ans, qui, pour une lésion tuberculeuse des deux sommets du poumon, avait subi une série d’injections de sérum de MARMORECK à doses de 5 centimètres cubes par semaine en cinq injections ; il fit rapidement au bout de six semaines de ce traitement, un accident grave du côté de son poumon, se traduisant par des râles sous-crépitants et des craquements au niveau du sommet ; le malade maigrit beaucoup, la constipation devint opiniâtre, le foie et la rate augmentèrent de volume, en même temps une sensibilité très vive se manifestait à leur niveau.

Du côté des dents, notre malade fit des caries sur toutes les dents de lait, aussi bien du maxillaire supérieur que du maxillaire inférieur, qui présentèrent ce caractère particulier d’être pour la plupart localisées au collet des dents.

  • Le malade fut très longtemps à se rétablir ;
  • il fut traité au point de vue local ;
  • presque toutes les dents temporaires furent extraites.
  • L’enfant est resté chétif ;

depuis trois ans que nous le suivons, il a grandi considérablement.

Ses premières molaires permanentes sont également cariées.

OBSERVATION N° 3

  • Tuberculose des deux sommets ;
  • injections de Marmoreck trop fréquentes.
  • Inversion de la température ;
  • état général grave ;
  • apparition de caries dentaires multiples.
  • Âge : 15 ans.

Une jeune fille âgée de 15 ans, présentant des accidents tuberculiniques au cours d’une poussée fébrile (congestion des deux sommets du poumon), fut soumise à des injections rectales de sérum de MARMORECK à doses de 1 à 5 centimètres cubes tous les deux jours ; au bout de 10 jours de ce traitement, l’état général de la malade s’était si profondément aggravé, que la température s’était inversée ; au lieu d’être plus élevée le soir, elle était plus élevée le matin ; les parents inquiets demandèrent à ce que cette médication fut suspendue, et après une longue convalescence qui dura plus d’une année, la malade finit par se rétablir.
Les traces de cette intoxication tuberculinique médicamenteuse se manifestèrent sur la denture de la malade d’une façon profonde ; toutes les dents furent plus ou moins atteintes de carie : elles apparurent à peu près trois semaines après la cessation du sérum de MARMORECK et prirent une allure rapidement destructrice.

Ces trois observations de véritables caries expérimentales nous ont fait penser à trois hypothèses possibles :

  1. Soit que les microbes de la bouche aient pris subitement une virulence inaccoutumée sous l’influence de la déchéance physique ;
  2. Soit que, sous l’influence des anticorps renfermés dans le sérum de MARMORECK, il y ait eu une mise en liberté considérable des toxines tuberculiniques hors du foyer malade, d’où déminéralisation considérable et rapide de toutes les cellules de l’organisme et particulière-ment des cellules de la dent ;
  3. Soit qu’enfin cette action toxinique, purement dynamique, ait agi sur l’odontoblaste en paralysant ses moyens de défense, en même temps qu’en arrêtant sa sécrétion calcaire (Cette action est facile à constater en clinique, où certaines dents sont à peine sensibles pendant le curettage et l’excision de la dentine malade: la dentine chez certains tuberculeux est hypoesthésique.)

Dès le début de nos recherches nous avons pensé que ces trois facteurs étaient généralement associés ; dès lors cette idée que la carie de cause générale est primitivement une intoxication des éléments vivants de la dent, nous a obstinément poursuivi ; nous avons pratiqué l’examen général de tous nos malades qui présentaient de la polycarie dentaire, et chaque fois, cet examen nous a révélé la présence d’un foyer de tuberculose ancien ou récent, placé en un point quelconque de l’organisme.

Preuves cliniques.

Elles abondent ; comment les rechercher ?
Ne voyons-nous pas constamment dans les salles de consultation et dans la clientèle particulière, une suite de malades présentant des caries multiples récidivantes ?
Si on les examine au point de vue général, ils appartiennent tous à la même famille ; on trouve que tous ont des lésions tuberculiniques à l’un des sommets des poumons, souvent même aux deux ; la pression au niveau de la rate révèle une certaine sensibilité.
La douleur à la palpation est constatable aussi du côté du foie ; ces troubles sont le plus souvent accompagnés de phosphaturie, souvent même de pertes blanches chez les femmes avec règles en retard, souvent irrégulières, douloureuses, rares.
Lorsqu’on touche les dents cariées avec des instruments excavateurs, la dentine réagit à peine sous l’instrument ; ilfaut aller très près du nerf pour réveiller une certaine sensibilité.
Nous avons vu chez certains tuberculeux cicatrisés, l’entraînement physique intensif, la grossesse, l’excès de travail intellectuel, jouer le rôle de surmenage pour l’organisme et amener des signes de déminéralisation sous forme de caries dentaires.
Un cas semblable est exposé dans l’observation suivante.

OBSERVATION N° 4

  • Caries multiples accompagnées de coryzas, pertes blanches.
  • Tuberculose ancienne du poumon gauche.
  • Rate et foie douloureux.
  • Age : 20 ans.

Une jeune femme de 20 ans vient nous trouver pour des caries multiples qui sont survenues très rapidement dans l’espace de six mois, sans qu’elle sache exactement pourquoi ; l’interrogatoire nous apprend qu’elle a fait à cette époque une série de coryzas accompagnés de pertes blanches abondantes, avec des règles en retard, très douloureuses ; son caractère a changé ; elle est devenue excessivement capricieuse, tantôt elle est gaie, tantôt elle est triste ; aussitôt après ces moments de gaieté, elle pleure sans savoir pourquoi ; ses mains sont froides, cyanosées.
L’examen nous révèle des symptômes encore plus importants du côté des poumons ; l’auscultation et la percussion ne nous révèlent que peu de chose, mais la pression au sommet gauche révèle un point très douloureux, de même qu’un autre point très sensible dans le deuxième espace intercostal gauche.
La rate est très sensible, volumineuse ; le foie est également douloureux, l’intestin capricieux ; la malade a en effet une constipation opiniâtre, quelquefois entrecoupée de crises de diarrhée.
D’après ces signes, nous faisons le diagnostic de caries tuberculiniques ; il s’agit ici d’une malade ayant fait autrefois une lésion tuberculeuse au sommet du poumon gauche, et dont les toxines ont une tendance à s’extérioriser dans le milieu péricellulaire dès la moindre fatigue ; l’apparition de caries multiples s’est produite dans ces conditions.
Nous avons publié déjà l’observation d’un cas où les caries étaient survenues très rapidement après une toxhémie tuberculinique à forme grippale. (B. DE NEVREZÉ, Les caries de causes générales. L’ Homéopathie Française, mai 1912.)
Nous la reproduisons ici :

OBSERVATION N° 5

  • Grippe infectieuse grave avec toxhémie tuberculinique ayant déterminé une déminéralisation rapide avec des caries dentaires multiples au troisième septénaire de son évolution.
  • Lésion du poumon droit.
  • Âge : 20 ans

(Due à la bienveillance du Docteur LAGARDE.)

Un confrère âgé de 31 ans se présente à nous et nous demande un examen de sa bouche ; frappé de la multiplicité de ces caries, car 22 dents sont profondément atteintes.
nous l’interrogeons, et il nous raconte qu’elles se sont cariées à la suite d’une grippe infectieuse particulièrement grave dont voici l’histoire :
En février 1908, à l’âge de 20 ans, notre malade est pris un soir par un violent frisson, et une douleur dans l’épaule gauche : ce phénomène ne dure que quelques instants ; le lendemain, point de côté à droite dans la région duquel on applique un large vésicatoire.
Un médecin est appelé, et pose le diagnostic de grippe infectieuse de cause tuberculinique. Pendant quinze jours fièvre, prostration, toux, langue dépouillée et à vif ; il semble que le malade se soit rincé la bouche avec un acide ayant corrodé toutes les muqueuses.
Vers la troisième semaine, douleurs dentaires très violentes. Le malade est envoyé en province pour changer l’air.
Convalescence de trois mois. Faiblesse extrême ; le malade ne peut se tenir sur ses jambes. Régime de viande crue ; douleurs néphrétiques très intenses.
Douleurs dentaires de plus en plus violentes. Le collet des dents est d’une sensibilité extrême. Il est impossible d’y toucher avec une brosse, avec l’ongle ou tout autre instrument. On sent comme un ressaut au niveau du collet de toutes les dents, une sorte de petite marche en passant de l’émail sur l’ivoire du collet.
Au cours d’une visite chez le dentiste, on trouve de la carie du collet à toutes les dents et de nombreuses caries sur la couronne des dents. Ce sont les dents de la mâchoire supérieure qui sont les plus atteintes. Les incisives sont également cariées ; toutes les caries sont traitées et obturées ; les collets polis à la meule.
Les souffrances endurées sont au-dessus de toute description ; le collet des dents est toujours resté très sensible et l’est encore actuellement au bout de 14 ans.
Ajoutons que, avant la maladie, toutes les dents étaient exemptes de toute carie. Il reste une lésion tuberculeuse cicatrisée au sommet droit du poumon.
Cette observation est bien démonstrative de la pathogénie toxinique de la carie : la gravité de la lésion pulmonaire dont l’évolution est nettement inflammatoire, la rapidité d’apparition des caries, leur grand nombre, sont autant de preuves que cc sont les toxines qui agissent comme agents de décalcification. On ne peut les expliquer par une action purement locale, chimico-parasitaire.
Il faut, en effet, une cause générale, grave, pour amener une déminéralisation si profonde et si rapide de tout l’organisme. La vraie cause est primitive-ment toxinique, en l’espèce, tuberculinique, l’action microbienne est secondaire.
Notons de plus que notre malade n’avait que 20 ans.
La récidive des caries vient encore à l’appui des autres signes cliniques pour prouver l’action des toxines dans la production des caries tuberculiniques.
Chez certains sujets, les caries récidivent sur les dents les mieux obturées, et si l’on étudie les circonstances dans lesquelles se produisent ces récidives, on arrive à la conclusion suivante : c’est que chaque crise de déminéralisation avec caries dentaires correspond à une invasion du système sanguin par les toxines tuberculiniques ; ces dernières s’extériorisent hors du foyer tuberculeux dès que le malade se fatigue trop longtemps, dès qu’il y a surmenage intellectuel, musculaire, nerveux ou génital, au cours d’une blennorragie intercurrente, au cours d’une grossesse ; la rate et le foie deviennent sensibles et gros, et bien souvent apparaissent de la constipation et de la phosphaturie.
Au contraire, si l’état général du malade s’améliore, les obturations dentaires restent intactes, et pendant toute la période de santé, aucune récidive de carie ne se produit ; mais vienne une nouvelle cause de surmenage (et ceci se rencontre fréquemment chez les femmes tuberculiniques qui ont des grossesses successives), on voit de nouveau les caries apparaître, mais beaucoup plus nombreuses et beaucoup plus profondes que lors de la première crise de déminéralisation.
L’examen des observations chez les femmes tuberculiniques qui font des grossesses répétées, montre que plus les crises de déminéralisation sont fréquentes, plus le nombre des dents cariées augmente.
Il semblerait que dans ces cas de récidives successives, on ait affaire à de véritables crises anaphylactiques, telles que LANDOUZY et GOUGEROT les ont décrites pour les arthropathies de nature tuberculeuse. (LANDOUZY et GOUGEROT, Pathogénie des arthropathies tuberculeuses, séreuses et congestives. PRESSE MÉDICALE, 1 er mai 1912.)
» Lorsqu’ une jointure a été touchée par les toxines tuberculiniques une première fois, elle reste pour ainsi dire sensibilisée ; vienne une décharge toxhémique, en raison de cette persistance d’anaphylaxie locale, l’articulation réagira sous forme de fluxion, sans que les bacilles aient besoin de se fixer à nouveau sur la séreuse articulaire (ce sont les arthrites anaphylactiques). »
De même les pulpes dentaires, paralysées une première fois par une invasion toxhémique, restent sensibilisées comme le tégument cutané ou muqueux qui fut tuberculinisé : vienne une nouvelle crise toxhémique, les pulpes dentaires verront leur vitalité diminuée davantage encore ; les odontoblastes ne défendront plus la dent ni dans son, émail, ni dans son ivoire. (On sait que la carie de l’émail est fonction de l’intégrité de l’ivoire. Les dents dévitalisées se carient plus rapidement que les dents vivantes.)
Les caries se reproduiront plus nombreuses et plus rapides clans leur évolution.

Preuves thérapeutiques.

Voici comment nous avons été amené à concevoir l’intervention thérapeutique comme preuve pathogénique de la carie des causes tuberculiniques.
Sous l’influence des toxines tuberculiniques, les odontoblastes subissent un certain degré d’intoxication qui se traduit par une diminution très nette de la sensibilité. Cette hypoesthésie favorise grandement l’action destructrice des microbes de la carie qui arrivent à la pulpe sans provoquer de réaction douloureuse.
La médication de drainage en provoquant l’élimination des toxines hors de l’odontoblaste malade réveille sa sensibilité normale et l’exagère, quelquefois même au point que tout traitement dentaire devient impossible.
Cette hypersensibilité causée par le remède de drainage se manifeste aussi sur d’autres cicatrices tuberculiniques, qu’elles siègent aux poumons, au niveau d’un ganglion guéri, soit même au niveau d’une ancienne cicatrice appendiculaire.
Ce réveil général de la sensibilité d’anciennes lésions tuberculiniques doit toujours être considéré comme un indice favorable, car cette hypersensibilité est toujours fonction d’une hypervitalité et d’un certain degré de recalcification.
Elle s’accompagne généralement d’une augmentation du poids affirmant, d’une façon plus objective, l’amélioration du malade.
Cette hypersensibilité dentinaire s’accuse chez presque toutes les femmes au moment de leurs époques, et ceci s’explique bien quand on songe que les règles ne sont pas autre chose qu’une voie de drainage naturelle, indispensable pour l’élimination des toxines.
Nous avons encore présente à la mémoire, notre première observation de dents devenues hyperesthésiques par un médicament de drainage (Hydrastis et Scrofularia nodosa).
En voici le résumé :

OBSERVATION N° 6

Drainage médicamenteux des toxines tuberculiniques de l’organisme. — Augmentation de la sensibilité de la dent rendant impossible tout traitement de la dentine. — Âge 13 ans.
Il s’agissait d’une malade chez qui nous désirions meuler une incisive centrale dont le coin mésial avait été brisé. Il n’y avait pas indication de restaurer ce coin par un inlay de porcelaine à cause de la faible perte de substance ; nous ne pûmes y arriver, tellement la douleur provoquée était grande.
Voyant cet insuccès, nous résolûmes de faire une injection de novocaïne-adrénaline de manière à anesthésier le nerf ; malgré une anesthésie parfaite, nous ne pûmes pas arriver à faire le meulage de cette dent sans provoquer des douleurs violentes, et nous fûmes obligé d’abandonner la partie.
Nous écrivîmes à son médecin pour savoir si elle ne prenait pas de médicament spécial, et nous apprîmes de lui qu’elle était déjà soumise depuis plusieurs semaines à un traitement de drainage (Scrofularia nodosa et Hydrastis), pour une tuberculose ganglionnaire.
A tout hasard nous demandons l’autorisation à son médecin de vouloir bien suspendre ce traitement pendant une huitaine de jours, au bout desquels nous tentâmes un autre essai qui, cette fois, fut couronné de succès.

OBSERVATION N° 7

Drainage médicamenteux des toxines de l’organisme. –Sensibilité excessive des nerfs dentaires rendant toute dévitalisation impossible.
La seconde observation qui s’offrit à nous fut celle d’une personne de 60 ans à qui nous nous proposions de faire un bridge complet du haut sur G 3, G 3, G 1, D 2 et D 3.
Ces dents toutes vivantes, étaient légèrement ébranlées par le port d’un appareil mobile, et durent être dévitalisées.
Cette dévitalisation fut certainement, de toutes celles que nous avons faites, le travail le plus pénible, le plus douloureux et le plus long ; car ni la cocaïne, ni la novocaïne-adrénaline injectées par voie muqueuse n’avaient leur habituelle action, et la sensibilité nerveuse de la dent était si peu diminuée, que nous fûmes obligé pour toutes les dents d’enlever les nerfs vivants que la cocaïne était impuissante à anesthésier et l’arsenic impuissant à détruire.
Ignorant les vertus des médicaments draineurs, nous avons perdu un temps considérable, et infligé à notre malade des douleurs inutiles.
Actuellement, nous n’entreprenons jamais de traitement d’aucune dent pendant une période de drainage, car les dents ont une sensibilité extrême qui rend le contact des instruments excessivement douloureux.
Il n’en est pas de même lorsque après un traitement de drainage, on a administré une tuberculine diluée, soit Marmoreck 30, soit Denys 100 ou 500.
Les dents, qui pendant le drainage étaient d’une sensibilité exagérée, perdent peu à peu leur sensibilité au contact des instruments, au chaud et au froid, et deviennent progressivement indolores ; témoin l’observation suivante :

OBSERVATION N° 8

Blessure de nerf dentaire : malgré cela, obturation de la dent qui reste sensible pendant 3 ans.
Le drainage par Nux Vomica 30 et immunisation par Denys 500 font disparaître la sensibilité thermique ; le nerf se répare.
Un de nos amis était l’objet, en 1909, d’un traitement de sa seconde grosse molaire inférieure gauche g 7. Il s’agissait d’un second degré profond d’une cavité occluso-distale que nous désirions obturer par un bloc d’or. Au moment de la cimentation du bloc, nous aperçûmes que le nerf venait d’être légèrement blessé d’un coup de curette au niveau d’une corne pulpaire.
Pensant que cette lésion traumatique n’avait pu permettre l’infection du nerf dentaire, nous décidâmes de passer outre et de cimenter, malgré ce petit accident, le bloc d’or.
Nous revîmes notre malade en avril 1912 pour un nettoyage, et quelle ne fut pas notre surprise lorsqu’il nous apprit que sa molaire inférieure gauche était restée excessivement douloureuse aux liquides froids, ce qui montrait d’une façon bien nette que le nerf ne s’était pas mortifié, pas plus d’ailleurs qu’il ne s’était protégé par sécrétion de dentine secondaire.
En présence d’une sensibilité aussi vive, nous décidâmes de faire le traitement de drainage par Nux Vomica 30° dilution à raison de 2 granules le matin et 2 granules le soir. Au bout de trois jours nous revoyons notre malade qui nous fit le récit suivant : dès le second soir, la sensibilité de la dent avait légèrement augmenté, et s’était mise à décroître progressivement pour disparaître rapidement au bout de la sixième prise du médicament.
Nous revoyons le malade 15 jours après, qui nous confirme que sa dent n’est nullement sensible, ni au chaud ni au froid ; nous avons le plaisir de constater nous-même par une vaporisation chaude, puis froide, que la dent ne réagit plus du tout et que visiblement toute sensibilité thermique a disparu ; néanmoins le galvanocautère appliqué sur la dent révèle la sensibilité habituelle du nerf encore vivant.
Au bout de 21 jours de ce traitement de drainage, nous donnons Denys 500 (bouillon filtré du bacille tuberculeux), sur les indications bien nettes de légère douleur, au sommet du poumon droit, indice d’une ancienne cicatrice tuberculeuse ; il en résulta un certain degré de sensibilité de toutes les dents à la fois qui se manifesta dans le jour qui suivit, sous forme de sensibilité thermique plus nette qu’à l’habitude au niveau de g 7 ; mais au bout de 10 jours tout était de nouveau rentré dans l’ordre.
Depuis ce temps-là notre malade se sert de sa dent sans aucun ennui.
De cette observation on peut conclure, que, déjà sous l’influence du traitement de drainage approprié, le nerf a sécrété de la dentine pour se protéger contre les impressions thermiques douloureuses ; la plaie pulpaire a été certainement cicatrisée, et cette cicatrice a été consolidée par l’hypersécrétion des odontoblastes sous l’influence excitante de la tuberculine Denys 500.

Que peut-on conclure de ces trois observations que nous avons choisies bien typiques ?

La précision et la puissance de cette thérapeutique recalcifiante sont évidentes, et on peut induire que :

  1. Ce qui recalcifie à doses infinitésimales, doit décalcifier à doses massives (suivant la loi de similitude) (Obs. I, II et III de tuberculinothérapie intensive avec décalcification).
  2. L’influence excitatrice d’une dose infinitésimale comme Denys 500 sur les fonctions sécrétantes des odontoblastes, doit être antagoniste d’une action paralysante des toxines extériorisées hors du foyer tuberculeux.
  3. Cette reminéralisation de la dent par les toxines tuberculiniques diluées, s’accompagne d’une densification des tissus dentaires, ce qui est révélé au contact des instruments excavateurs par le cri dentinaire (FRET) et cela peu de temps après le traitement.
  4. Cette recalcification de la dent est suivie de la disparition des signes de déminéralisation de l’organisme tels que : suppression de la constipation, des céphalées, de la chute des cheveux, etc…, le poids augmente.
    (FERRIER avait bien noté cette constipation des tuberculeux, et avait ajouté à sa formule recalcifiante, un peu de magnésie pour purger son malade. Il avait traité le symptôme et non la cause.)
    L’action de la dose infinitésimale de tuberculine sur l’odontoblaste, nous donne donc d’une part, la pathogénie de la carie de cause toxinique, et d’autre part la démonstration de son traitement.
  5. Preuves histologiques.
    Cette notion de l’action dynamique excitatrice et reminéralisatrice d’une tuberculine diluée sur le nerf dentaire restait malgré tout dans le domaine de l’hypothèse.
    Il fallait, pour appuyer la pathogénie toxinique des caries tuberculiniques, une preuve matérielle et constater sur les dents appartenant à un malade traité après immunisation et recalcification, des formations de dentine secondaire ; il fallait, de plus, pour éviter toute cause d’erreur, que la dent fût absolument saine, indemne de toute carie, de façon qu’on ne pût attribuer à, une lésion de l’ivoire par carie, la cause de ces néoformations dentinaires.

Ces conditions furent un jour réalisées dans l’observation suivante :

OBSERVATION N° 9

  • Tuberculose ancienne du poumon droit.
  • Immunisation par cinq doses de tuberculine et recalcification par le fluorure de chaux.
  • Augmentation du poids et amélioration de la santé.
  • L’examen histologique d’une dent saine extraite montre la formation de dentine secondaire sur la paroi pulpaire.

M. G., âgé de 12 ans, vient nous consulter pour le traitement de ses caries ; d 6, g 6, d 5 et g 5 ont été extraites ; G 6 et D 6 ont été obturées. L’examen des antécédents nous apprend qu’il y a eu une rougeole à l’âge de 8 ans dont nous voyons la trace sur les prémolaires sous forme de taches blanches de l’émail. (Bertrand de Nevrezé: Lésions dentaires systématisées. L’ Homéopathie Française, février 1912.)
Son poids est de 33 kgs. Constitution minérale du type fluorique.
L’examen physique révèle une sensibilité très grande au sommet droit sous la pression ; l’auscultation montre que le murmure vésiculaire est très affaibli ; le foie est gros, la rate est douloureuse, la constipation est presque la règle.
Devant cet ensemble symptomatique, nous portons le diagnostic de caries tuberculiniques, et nous instituons un traitement d’immunisation et de recalcification ; le malade reçoit d’octobre à février cinq doses de tuberculine : trois de Marmoreck 30 à raison d’une dose par mois, et deux de Denys (100° et 500°) dans les deux derniers mois ; dans l’intervalle il est drainé avec Solidago 1 X, Nux Vomica 30, Coenothus 30, et Pulsatilla 30 alternés ; il est recalcifié par des doses quotidiennes de fluorure de chaux 6° trituration décimale.
Nous passerons volontairement tous les détails de cette observation pour arriver à l’objet qui fut remarquable, et nous dirons seulement que le malade prit 6 kgs dans l’intervalle d’octobre à avril.
A ce moment nous sommes obligés, pour faire un redressement, de faire l’extraction d’une prémolaire supérieure droite ; nous la faisons préparer pour en faire un examen histologique, afin de voir qu’elles étaient les modifications que pouvait avoir subies la pulpe au cours de notre traitement général d’immunisation par les tuberculines diluées et par le fluorure de chaux.
Cette coupe qui est la première de ce genre, nous a révélé des détails dont l’importance n’échappera à personne ; macroscopiquement, l’intensité du processus réactionnel a été tel que la dentine sécrétée secondairement sous l’influence des tuberculines a fait une saillie circonscrite, une véritable protubérance.
Au microscope, cette dentine néoformée envahit la cavité pulpaire, la réduit de calibre. Notons que le début de ces néoformations s’est fait sur la paroi vertico-axiale de la chambre pulpaire.
Cette observation faite en collaboration avec M. DUMONT, chef de laboratoire à l’hôpital de Bicêtre, est des plus importantes puisqu’elle montre la possibilité d’exciter et de suractiver les fonctions sécrétantes des odontoblastes par voie sanguine ; elle représente pour notre théorie de recalcification des dents par le drainage et l’immunisation préalables, la valeur d’une expérience indiscutable.
Elle précise les résultats obtenus dans nos observations de pulpe blessée dont le nerf s’est régénéré sous l’influence des médicaments de drainage et des tuberculines immunisatrices. (Preuves thérapeutiques, obs. n° VIII. )
Elle établit d’une façon définitive la prophylaxie de la carie de cause tuberculinique, puisqu’on peut à volonté exciter la sécrétion pulpaire.
En raison de ces faits qui nous autorisent à donner aux toxines le rôle le plus important parmi les causes efficientes de la carie de causes générales, on peut dire que cette carie est primitivement une toxinose dentaire et, quand il s’agit de tuberculose, une tuberculinose dentaire
Secondairement, les microbes de la bouche assaillent la dent mal défendue par ses odontoblastes, eux-mêmes paralysés par l’action dynamique de la toxine déminéralisante.
Ne savons-nous pas d’ailleurs depuis les recherches de WRIGHT sur les opsonines ; qu’au cours d’une affection ou d’une intoxication, le pouvoir phagocytaire des globules blancs est essentiellement variable ?
Quand l’indice opsonique baisse, les globules blancs sont diminués dans leurs propriétés phagocytaires vis-à-vis des microbes, et peuvent même être détruits lorsque cet indice s’abaisse d’une façon trop considérable ; il s’agirait là d’une véritable paralysie de la cellule vivante qu’est le globule blanc, et qui le rendrait inapte à se défendre contre les microbes pathogènes.
Pourquoi ne pas supposer pour l’odontoblaste ce qui est définitivement démontré pour le globule blanc et pour toutes les autres cellules de l’économie ?
Si l’on voulait faire un schéma (rectangle ABCD et sa diagonale, fig. 1), nous verrions que les deux causes :

  1. Toxiniques
  2. Chimico-parasitaires,

varient suivant l’âge ; jusqu’à l’âge de 20 ans (a d) par exemple, les causes toxiniques sont plus importantes que les causes chimico-parasitaires ; à partir de 40 ans (b c) ce sont les causes chimico-parasitaires qui prennent le pas sur les causes toxiniques.
polycarie
Nous en savons la raison, c’est qu’au début de la vie, les dents sont macro-pulpaires, par conséquent les toxines ont sur elles une grande influence.
A la fin de la vie, elles sont micro-pulpaires (à pulpe réduite) ; la carie est relativement plus rare puisqu’elle échappe à l’action toxinique. (Ce schéma n’indique que les variations du caractère de la carie suivant l’âge.)

En conclusion
Nous terminerons ce chapitre par une définition s’appliquant en particulier à la-carie des causes tuberculiniques chez l’adulte.
La polycarie dentaire tuberculinique est une maladie de la dent, caractérisée par deux périodes distinctes :
Une première phase où la toxine causale diminue la vitalité des odontoblastes par une action dynamique probablement paralysante, peut être déjà déminéralisante ;
Une seconde phase où les microbes devenus hyper-virulents à cause de la déchéance du terrain, assaillent la dent, détruisent l’émail, l’ivoire et la pulpe dentaire par le processus centripète qui aboutit finalement à la destruction de la dent.
De cette définition découle le traitement pathogénique de la carie de causes tuberculiniques, ce traitement c’est la tuberculinothérapie dont les trois termes ont été si bien étudiés par LÉON VANNIER : (Dr LÉON VANNIER, Le sérum de Marmoreck dilué. L’ Homéopathie Française, mai 1912.)
1° Drainage des toxines microbiennes ;
2° Immunisation tuberculinique ;
3° Recalcification.
Le rôle du dentiste ne peut donc plus être un simple rôle mécanique ; la nécessité où il se trouve d’examiner ses malades au point de vue général le force à étudier les lois de la pathologie et de la thérapeutique générale.

Références :

L’ Homéopathie Française, octobre 1913, tome 2, pages 698 à 705.
L’ Homéopathie Française, décembre 1913, tome 2, pages 848 à 862.

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Thierry supplie

Par : Thierry Supplie

Prothésiste de R. DEVIN. Réalisation des prothèses totales pour le service de prothèse complète de Paris VII - Hôpital Albert Chenevier à Créteil. Assistant en prothèse totale au sein de la Faculté Dentaire de Garancière Paris V dans le service du Professeur LEJOYEUX – dirigé par le Professeur Roger GOUMY. Réalisations de travaux de prothèses pour la Pitié Salpêtrière pour des patients après chirurgie tumorales. Correcteur d’examen BTM pour la Chambre des Métiers de Paris. Rédaction du Référentiel Qualité de l’UNPPD Conférence à la Faculté Dentaire de Moscou avec le concours de la CCIP et la participation de Hugues BORY Conférence durant le congrès dentaire Dentiste Expo 2019 au palais des expositions porte de Versailles. Formateur DPC avec mise en place de formations.

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