Communication : comment optimiser la relation praticien- patient en prothèse complète
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Si la communication est importante dans la vie quotidienne, elle est fondamentale dans le domaine de la santé où nous sommes confrontés à des sujets qui présentent une souffrance physique, psychologique et sociale. Combien de prothèses clinique ment tout juste acceptables sont elles merveilleusement tolérées alors que d’autres techniquement irréprochables ne sont jamais réellement supportées I II est important de se rendre compte que les reproches n’apparaîtront qu’après la mise en bouche. Pendant toute la phase de réalisation prothétique, le patient est dans l’expectative, sans exigences palpables. Aussi, une écoute insuffisante ou dilettante du praticien envers son patient ainsi qu’une absence de prise en compte de ses allusions, aboutissent-elles parfois à une mauvaise perception des exigences et nuit à l’harmonie de la relation. Plus inconscient, le praticien doit tenter de deviner le « non-dit » du patient qui correspond à ses pensées inavouées. Enfin, l’utilisation abusive de termes trop techniques incompréhensibles pour un profane, loin de le rassurer, aboutit à des doléances sans fin que le praticien ne parvient plus à gérer. C’est notre compétence à assurer une relation de confiance claire et approfondie qui va déterminer, aux yeux de nos patients, notre compétence professionnelle.
La communication non verbale
« La communication non verbale est l’ensemble des moyens d’échanges entre les individus vivants n’usant pas du langage humain en tant que lin-guistique verbale. On y regroupe toutes les attitudes gestuelles, posturales, faciales et vocales. Le corps tout entier peut participer à cette expression. » [3] Le non-verbal prime toujours sur le verbal même si notre société prétend ignorer ce fait. Le toucher constitue une voie privilégiée de la communication non verbale. Les réactions au toucher peuvent être perçues avec de grandes variations selon le sujet et au cours de différentes situations. La poignée de main échangée, signe qu’une relation affective positive s’engage, qu’elle soit franche, hésitante ou absente au moment de l’accueil, nous renseigne d’emblée sur les dispositions du patient à communiquer [5]. Par ailleurs, des gestes brusques, crispés, transmettent au patient les tensions du praticien, d’autant plus gênantes qu’elles sont inaccessibles au regard. À l’opposé, un geste calme et plein d’assu¬rance le décontracte et améliore le climat de confiance. La posture La posture est définie par Corraze comme « la position d’un élément du corps par rapport au reste du corps et par rapport à d’autres corps » [3]. Les informations posturales sont d’une singulière importance dans les rapports d’apaisement, d’agression ou de soumission passive. L’attitude posturale du patient dans la salle d’attente (prostrée ou épanouie), l’endroit où il s’installe (dos au mur ou face à la porte) [5] et son état d’esprit (agacé ou indifférent à un retard) nous livrent déjà des informations sur ses prédispositions envers nous et sur nos relations futures. Déléguer l’accueil du patient à l’assistante peut nous priver de précieux renseignements. Au cours de la première consultation, les premiers échanges destinés à établir l’anamnèse du sujet et à tenter de déceler ses aspirations seront entrepris au bureau, permettant ainsi de respecter « une distance sociale » (entre 1,20 et 3,70 m), barrière de protection inconsciente derrière laquelle le sujet peut se retrancher pour éviter toute agression directe [5]. Puis, l’examen clinique se poursuit au fauteuil. Afin de préparer le patient à un contact étroit et répété dans sa cavité buccale, il faut élaborer un stratagème pour, nous permettre de franchir cette barrière et pénétrer « l’espace intime » du sujet. Cette distance intime (entre 15 et 45 cm) est une zone qui s’accompagne d’une grande implication physique et d’un échange sensoriel élevé (fig. 2a). À ce stade, toucher et posture se superposent. Toucher son bras et exercer une pression symétrique sur les épaules en mettant un champ opératoire sont des gestes d’approche naturels. Il faut veiller cependant à ne jamais choquer. Enfin, au cours des soins, nos patients ont tous leurs sens en éveil (odorat, goût, ouïe, vue…). Toutes ces sensations interagissent entre elles (fig. 2b et c). La relation est donc extrêmement complexe (fig. 2d). De plus, les patients subissent une soumission passive [6-8] (ils sont couchés, bouche entrouverte) pendant que nous exerçons une domination active : nos mains pénètrent leur sphère orale, tête face à eux, corps incliné vers l’avant [3, 7, 9, 10]. La possibilité offerte de modifier à souhait l’inclinaison du patient sur le fauteuil doit être effectuée progressivement, en douceur, sous peine d’accentuer un sentiment d’agression [5]. La relation d’amitié, qu’aura su créer le praticien avec son patient, revêt ici toute son importance. La face La face est la zone privilégiée de l’expression de nos émotions que nous sommes à même de maîtriser parfaitement. Il est en effet possible de sourire sans pour autant ressentir aucun contentement. Le sourire a cependant une valeur de rapprochement sincère, il est le gage d’une relation affective positive et son impact social est reconnu. Ahrens (cité par Corraze [3]) prétend, en 1954, que « le sourire, en réponse à un visage humain, est d’abord déclenché par le regard ».fig. 2a – Facteurs extérieurs intervenant dans la relation non verbale. Le toucher est la voie privilégiée de cette relation. | fig. 2b – Champ d’action de la relation à partir du patient. |
fig. 2c – Champ d’action de la relation à partir du praticien. | fig. 26 – Complexité de la relation par interaction de toutes les sensations. |
fig. 3 – Influences extérieures multiples agissant sur la personnalité de l’individu. | fig. 4 – Champ de conscience de l’individu. |
fig. 5 – Face à une situation simple, les capacités d’adaptation sont très différentes d’un individu à l’autre. Plus le patient mettra du temps à décoder l’information, moins il aura de temps pour l’intégrer. Ses capacités d’adaptation s’en trouvent diminuées. | fig. 6 – Les capacités d’adaptation tout au long de l’acte prothétique peuvent varier chez un même individu. |
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